Homélie
Prière universelle

LA CANANEENNE Matt 14/21-28 20ème dim T.O

On a du mal à comprendre le comportement de Jésus au début de cet évangile, lointain, opposant un refus à une demande tellement compréhensible, lui qui a déclaré : « Laissez venir à moi les petits enfants », qui vient de nourrir la foule… Que se passe-t-il ? Il est vrai que nous sommes en territoire païen, cette terre des phéniciens où Jésus ne s’est pas encore trop risqué. S’il cherchait la discrétion, c’est manqué avec cette femme qui arrive en criant : « Prends pitié de moi Seigneur Fils de David ! » Elle s’adresse à lui comme à un thaumaturge : « Ma fille est tourmentée par un démon ! ». Les apôtres ont vu le danger et poussent Jésus à la renvoyer : « Elle nous casse les oreilles !

Mais voici que cette histoire prend un tour assez extraordinaire qui va montrer sa foi. Quelle foi ! C’est une femme on ne peut plus étrangère, elle est d’une tribu hostile aux Juifs.

Malgré les rebuffades,
elle est tenace et persiste
dans sa demande de guérir sa fille.
Elle défie l’étroitesse d’une tradition
qui limitait la miséricorde de Dieu à quelques choisis,
et elle en est généreusement récompensée


Que se passe-t-il ? Certes Cananéens et juifs sont ennemis de longue date, mais c’est pourtant chez des païens que Jésus a guéri le serviteur du centurion. Pourquoi cette attitude qui devient même méprisante : « Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le jeter aux petits chiens ». La femme a beau crier, il demeure inflexible. Est-il fatigué au point de ne plus voir personne ? Jésus reste de marbre. Non, ce qui le fait intervenir, et ce qui lui fait dire que la foi de cette femme est grande, c’est quand elle rebondit sur sa remarque cinglante, et quand il lui dit : « Il n'est pas bien de prendre le pain des enfants pour le jeter aux petits chiens », elle lui répond, avec une certaine vivacité d’esprit : « C'est vrai, Seigneur, et justement les petits chiens mangent des miettes qui tombent de la table de leurs maîtres ! »

Pour elle, il y a d’un côté les petits chiens, de l’autre les maîtres. Le surplus de nourriture des maîtres permet aux petits chiens de se nourrir. Que représentent les maîtres ? Que représentent les petits chiens ? Un peu avant, il y a eu la multiplication des pains. Tous ceux qui étaient là ont mangé à leur faim, et il y a même eu des restes : douze corbeilles pleines. Les maîtres, ce sont les Juifs, bien sûr, et les petits chiens, ce sont tous les autres.

Mais qu’y a-t-il là qui puisse faire dire à Jésus que la foi de cette femme est grande ? Elle reconnaît qu’il y a une différence entre les maîtres et les petits chiens, entre les juifs et les païens. Elle a compris, bien que n’ayant pas reçu une éducation juive, quelque chose de fondamental pour le judaïsme,

la capacité à reconnaître
que l’autre est différent de moi,
et qu’il n’est pas moi,

cette capacité à reconnaître que Dieu est le Tout-Autre, cette reconnaissance de la limite qui est la marque, la garantie du respect de l’autre. Cette femme reconnaît que le peuple juif est différent des autres peuples. Pas meilleur, mais différent par son rôle dans la révélation de Dieu aux hommes, un rôle de précurseur. Et pourtant, rien ne la prédisposait à cela : les juifs ont toujours été les ennemis jurés des cananéens. Ce dont elle prend conscience ne vient pas d’elle : c’est une prise de conscience.
La foule et les apôtres ont appris ce jour-là que le Seigneur est venu pour tous, Juifs et non-juifs, chacun en son temps. M’arrive-t-il de juger les gens trop rapidement ? Ils savent que Dieu fait tout avec ordre et mesure, qu’il y a une histoire du salut.

« Seigneur apprends-nous à prier ! »



Prière universelle

Le Seigneur invite tous les peuples dans sa maison de prière.
Animés d'un souffle missionnaire,
en méditant les textes de la liturgie,
répercutons son invitation le plus largement possible.

"Mon salut approche,
je conduirai mes serviteurs à ma montagne sainte et je les comblerai de joie",
dit le Seigneur par son prophète Isaïe.
Prions Dieu de soutenir la foi des prédicateurs de son Église;
qu'ils ne se lassent ni ne s'effrayent
devant l'annonce bouleversante de la Tendresse de notre Dieu.

R/ I 12 Dieu d'amour, écoute-nous

"Tu gouvernes les peuples avec justice
et tu conduis les nations", dit le psalmiste.
Prions Dieu de visiter les cœurs des chefs d'Etat,
afin qu'ils aient le courage de prendre les décisions nécessaires
pour pallier aux inégalités face à la cherté de la vie.

"Femme, ta foi est grande,
que tout se passe pour toi comme tu le veux !" dit Jésus à la cananéenne.
Prions Dieu pour tous ceux qui crient au secours et sont rabroués;
et demandons-Lui la grâce de l'émerveillement
devant la foi qui parvient à incliner le cœur de Dieu.

"L'appel de Dieu est sans repentance.
Aujourd'hui vous avez obtenu miséricorde", dit l'apôtre Paul.
Prions Dieu de renouveler en chacun
l'estime de soi et la gratitude pour le don de Dieu,
en vue de progresser vers la communion entre nous tous,
qui sommes pécheurs, mais pécheurs pardonnés.

Seigneur, Tu as dit qu'il suffit de prier avec foi pour être exaucé.
Dans cette confiance, nous te demandons d'accueillir notre prière,
par Jésus le Christ notre Seigneur.

Abbaye
Notre Dame de
Jouarre