Homélie
Prière universelle
Homélie du P. Désiré 

« Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi… » (Mt 10, 37). A écouter ce discours de Jésus, comme ses disciples quand il leur disait de manger sa chair et de boire son sang, nous aussi comme ses disciples, disais-je, nous avons envie de dire : « cette parole est rude ! Qui peut l’entendre ? » (Jn 6, 60). Jésus, saurait-il s’opposer à nos amours légitimes, sains et humanisants ? Ne devrait-il pas les soutenir, les bénir ?
Frères et sœurs, si ces paroles de Jésus sont dans nos oreilles comme un paradoxe et nous laissent K.O. C’est peut-être parce que nous avons oublié que Jésus au milieu des hommes est en mission. « En effet, le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu » (Lc 19, 10). Pour accomplir une telle mission, il faut parfois s’adapter aux réalités du terrain. Jésus, on l’a très souvent entendu s’appuyer sur le vocabulaire agraire ou parler des pasteurs. Dans l’évangile d’aujourd’hui, il emploie des paradoxes. Le sens du paradoxe n’est pas littéral, le paradoxe cherche à provoquer, à inquiéter. Il n’est pas à expliquer mais à méditer. Si Jésus parle de manière paradoxale, c’est justement pour que ses auditeurs ne le comprennent pas superficiellement mais médite sa parole.


Pour nous aider à comprendre l’évangile d’aujourd’hui, imaginons deux groupes d’hommes : un premier constitué de ceux qui sont envoyés en mission et que nous allons appeler : « groupes des évangélisateurs » ; le second, formé de ceux qui reçoivent les premiers, nous allons les appeler : « groupe des évangélisés ». C’est donc à ces deux groupes que Jésus s’adresse. Aux évangélisateurs, Jésus adresse un discours paradoxal provocateur car il cherche à les inquiéter, les aviser, prévenir. Le ton est donc déstabilisant : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi ; […] Qui a trouvé sa vie la perdra ; qui a perdu sa vie à cause de moi la gardera. » (Mt 10, 37-39).
Pour les évangélisés, le discours de Jésus est gratifiant, rassurant ; Ce que visent Jésus, c’est de donner confiance et apaiser : « Qui vous accueille m’accueille ; et qui m’accueille accueille Celui qui m’a envoyé. Qui accueille un prophète en sa qualité de prophète recevra une récompense de prophète ; […] Et celui qui donnera à boire, même un simple verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, amen, je vous le dis : non, il ne perdra pas sa récompense. » (Mt 10, 40-42).  A chacun de ruminer ces paradoxes de Jésus selon le groupe dans lequel il se sent interpellé. Et qu’il se demande ce que Jésus veut lui dire aujourd’hui dans chacun de ces paradoxes ?
Les paradoxes, il y en a plein dans le Nouveau Testament. Nous connaissons certains par cœur. Par exemple : « Quel malheur pour vous lorsque tous les hommes disent du bien de vous ! » (Lc 6, 26) ; « je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. » (Mt 10, 34) ; « Heureux les pauvres » (Mt 10, 3 » ; « Heureux les persécutés » (Mt 10, 10). Comment ne pas se rappeler du Maître qui lave les pieds des serviteurs (Jn 13, 14). Frères et sœurs, l’important n’est pas de les connaître mais de les vivre. En tant que chrétiens, la mission du Christ est aussi la nôtre. Mais, il faut bien reconnaître que suivre le Christ, n’est pas une chose facile. Cela n’est possible que si on a une certaine échelle de valeurs. L’Evangile d’aujourd’hui vient donc nous rappeler que suivre le Christ demande une certaine disponibilité, un certain engagement, une certaine radicalité dans nos choix et dans nos décisions.
L'amour de Jésus-Christ n'annule pas l'amour de son propre sang. Jésus est le centre de notre vie ; voilà pourquoi la foi en l'amour qu'Il a pour nous est la source de l'amour que nous avons pour les nôtres et pour notre prochain. Dès lors, si pour une raison vraiment absurde, l’amour filial ou l’amour paternel étaient opposés à nous, la suite du Christ l’emporte. Car voyez-vous, il y a une réelle et profonde communion de vie en vrai avec Jésus qui est mort et ressuscité pour nos péchés. Configurez à Lui, notre condition de chrétiens devient quelque chose de plus qu’une simple conviction ou une décision personnelle de le suivre. Elle est un don gratuit de Dieu qui nous appelle et nous incorpore à son fils. C’est en cela que Saint Paul nous dit ce dimanche que nous avons été unis par le baptême en Jésus pour mener une vie nouvelle (Rm 6, 4).
Que veut dire mener une vie nouvelle sinon que chercher le chemin de conversion tous les jours. Par exemple dans notre monde individualiste où les rencontres humaines sont désormais digitalisées et où l’homme est devenu un numéro, réapprendre ce que c’est que l’hospitalité ; ouvrir les portes de nos cœurs mais aussi nos portes physiques avec toute la prudence qui convient pour accueillir un frère ou une sœur en situation de nécessité.
Mener une vie nouvelle, c’est aussi savoir ouvrir les yeux et discerner les réalités de notre monde. Le rythme de vie de nos sociétés occidentales tend à nous centrer sur nous-mêmes et à nous désintéresser des autres. Les circonstances actuelles nous amènent à nous méfier des étrangers qui nous approchent. Il est indéniable que sur le plan économique, se développe davantage le cercle vicieux et infernal : sociétés développées-sociétés sous développées. Les premières préservant leur bien-être en exportant et entretenant la misère des deuxièmes.  Le chrétien doit réagir et ne pas se laisser phagocyter par ces mécanismes subtils soient-ils qui nous déshumanisent. Il doit défendre la liberté et la justice face à tous ceux qui manipulent l'homme et toutes les valeurs aliénantes que le monde affirme et défend. En cela, se mettre à la suite du Christ est aussi accepter le chemin de croix ; c’est-à-dire la possibilité de souffrir par fidélité à la Vérité et à l’Amour de Christ.
Mener une vie nouvelle, c’est peut-être aussi accueillir ; c’est-à-dire s’ouvrir aux autres avec désintéressement. Et derrière celui à qui nous redonnons du sourire, il y a peut-être un Elysée, un prophète ; et derrière lui, il y a Jésus qui veut habiter parmi nous.
Qu’en ce dimanche, le Seigneur nous accorde la grâce de la mystique d’accueil afin d’apporter au milieu de nous un peu de chaleur humaine et un peu de présence de Dieu.
 Amen.
Désiré AYINA, sj. 

Prière universelle 

En réponse à la Parole du Seigneur,
que notre prière pleine de confiance monte vers le Père.

Aujourd’hui, des chrétiens témoignent de leur foi au prix de leur vie,
d’autres ont peur de prendre la croix …
Demandons à Dieu notre Père de donner aux baptisés,
force et courage pour suivre le Christ.

I 29b : Exauce-nous, Dieu notre Père !

Aujourd’hui, comme la femme sunamite a accueilli le prophète,
des hommes et des femmes ouvre leur maison et leur cœur.
Demandons à Dieu notre Père cette grâce d’accueil
de l’étranger pour notre pays et ceux qui le gouvernent.

Aujourd’hui, nous sommes touchés par la violence
qui se manifeste autour de nous comme à Nanterre.
Demandons à Dieu notre Père de nous apprendre
à nous accueillir les uns les autres avec bienveillance
et à chercher la paix entre tous.

Aujourd’hui la Parole de Dieu nous appelle à aimer
Demandons à Dieu notre Père la grâce de vivre de sa Parole
et de transmettre la joie de l’Évangile dans une charité active et inventive.

Dieu notre Père, viens au secours de ton peuple,
toi qui accueilles notre prière
en Jésus, le Christ, notre Seigneur.
Amen

Abbaye
Notre Dame de
Jouarre