Homélie
Prière universelle
 Homélie du P. Désiré 

Aujourd’hui nous sommes en présence d’un évangile que nous avons déjà lu cette semaine. Il me semble que c’était mardi. Faut-il rappeler le contexte ? Ayant appris la décapitation de son cousin Jean le Baptiste, Jésus s’était enfuit dans un lieu solitaire peut-être par besoin de pleurer et de prier pour son ami et cousin Jean, peut-être aussi parce qu’il avait senti en cette mort un prélude à sa propre mort. Mais, le moment n’était pas encore venu d'affronter sa passion. En recherchant la solitude, il a attiré à lui des personnes en mal d’espérance qui n’avait en plein désert ni où loger ni de quoi se nourrir. Alors prenant en pitié cette multitude affamée, Jésus a multiplié le pain pour la nourrir et, après que tous furent rassasiés, les disciples ont récolté 12 corbeilles de ce qui restait. C’est alors qu’intervient la séquence que nous avons lu ce dimanche : Jésus obligea ses disciples à lever immédiatement le camp.

Deux ou trois raisons pourraient justifier une telle attitude de Jésus.

La première serait l’urgence de la mission qui exige de ne pas perdre du temps. Après la mort de Jean le Baptiste, Jésus a résolument pris sa mission en main et le temps presse pour l’accomplir ; alors devrait-il aller ailleurs pour prêcher la bonne Nouvelle en d’autres lieux (cf Mt 11, 1). La deuxième raison serait le risque de succomber à la tentation du succès. Dans l’épisode des tentations au désert (Mt 4,1-11) le Tentateur lui avait demandé de changer les pierres en pain pour assouvir sa propre faim. Et, Jésus avait refusé. Or, ici ; il venait de multiplier des pains certes pour nourrir son peuple mais il y avait là un réel risque sinon pour lui, du moins pour ses disciples de se glorifier de ce succès ce d’autant plus qu’ils attendaient un messie puissant ; cette multiplication de pain pouvait leur donner matière à rêver. Finalement, la troisième raison pourrait être le besoin pour Jésus de se ressourcer dans la prière comme à son habitude pour dialoguer avec son Père ou simplement pour souffler un peu : « Quand il eut renvoyé les foules, dit Matthieu, Jésus gravit la montagne, à l’écart, pour prier » (Mt 14, 23). Somme toute, si Jésus force ses disciples à s’embarquer en les séparant de la foule, n'est-ce peut-être pas pour rester prier en faveur de ces derniers afin qu’ils ne cèdent pas à la tentation du messianisme triomphant ? C’est en tout cas, ce que semble nous dire Saint Jean qui, rapportant son témoignage du même épisode de la multiplication du pain, dit : « Jésus savait qu’ils allaient venir l’enlever pour faire de lui leur roi ; alors de nouveau il se retira dans la montagne, lui seul » (Jn 6, 15).

Cela dit, en portant un regard sur ce qui s’est passé dans la barque, le personnage de Pierre peut davantage nourrir notre méditation car, à travers lui, Matthieu nous décrit la condition de tout disciple : une condition faite de hauts et de bas ; en d’autres termes d’élans sincères et de fragilité.

Voyez-vous les disciples étaient des marins expérimentés : n’oublions pas qu’ils étaient des pécheurs pour la plupart quand le Seigneur les a appelés. Et, depuis qu’ils sont en compagnie du Seigneur, ils n’étaient pas à leur première expérience de tempête en pleine mer ; ils avaient même déjà vécu avec lui l’épisode d’une tempête apaisée (cf. Mt 8,23-27) après la guérison de la belle-mère de Pierre (Cf. Mt 8, 14-15). Riche de cette expérience, les disciples n’avaient pas de raison d’avoir peur même en l’absence du Maître. Ce qui les a fait paniquer, c’est l’apparition de cet homme qui marchait sur les eaux et qu’ils ont pris pour un fantôme. Quand la voix a retenti et qu’elle leur a paru reconnaissable, c’est alors que Pierre est entré en action : « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur les eaux » (Mt 14, 28).

Frères et sœurs, la demande hardie et pour le moins étonnante de Pierre n’a d’autre raison que de vérifier si la voix qu’il semble avoir reconnue est bel et bien celle du Maître. Et, si Pierre veut vérifier que c’est bien la voix de son Maître, n’est-ce peut-être pas là un signe qu’il ne connaît véritablement pas encore la voix de son Maître ? Pour le dire autrement, par sa demande, Pierre ne manifeste-il pas le doute qui raisonne encore en lui et évidemment en les autres apôtres malgré le quotidien qu’il partage avec Jésus ? Est-il vraiment le Messie attendu ? Dans son élan à aller marcher sur l’eau, personne parmi les autres disciples n’a su retenir Pierre et confirmer par le fait même que c’est la voix de leur Maître qu’ils avaient bel et bien entendue les invitant à ne pas avoir peur ; mais à lui faire confiance comme en tant d’autres fois : « Confiance ! c’est moi ; n’ayez plus peur ! » (Mt 14, 27) ? A l’instar des apôtres notre foi n’est-elle pas parfois aussi chancelante ? Sommes-nous sûr de reconnaître la voix du Seigneur qui, à chaque instant de nos vies, nous appelle ?  

Jésus, répondant à l’élan de son disciple, a simplement dit « Viens » ; et aussi incroyable que cela puisse paraître, Pierre se mit à marcher sur l’eau. Mais parce qu’il a détaché les yeux de Jésus, il a sombré. Comme les histoires passent et se ressemblent, c’est encore le même Pierre qui lors de la passion aura le plus d’élan pour son maître : « Même si je dois mourir avec toi, je ne te renierai pas » (Mt 26,35). Pourtant, cette nuit-là, précisément, il reniera son Maître, par trois fois. Frères et sœurs, l’attitude de Pierre, nous rappellent que comme le disciple nous ne sommes jamais à l’abri d’une reculade. Nous comprenons alors que la foi n’est pas une affaire d’un élan personnel. Elle est un don de Dieu et il faut savoir compter sur lui pour la soutenir. En effet, celui qui se croit le mieux assuré peut encore perdre pied, comme Pierre ; il a détaché les yeux de Jésus, et il a sombré. Or, si Jésus a dit « Viens ! », c’est parce que cela était possible, avec son aide, bien sûr. Mais, il ne fallait pas regarder ailleurs et s’inquiéter de la puissance du vent. Heureusement que sa fragilité lui a inspiré une belle prière : « Seigneur sauve-moi » (Mt 14, 30). Alors, Jésus étendit la main, le saisit pour le mettre en sûreté. 

Comme Pierre, Frères et sœurs, chacun de nous a ses faiblesses, ses peurs, ses angoisses et ses fragilités. Bref, des fantômes qui hantent nos vies. Mais, Jésus nous invite aujourd’hui à chasser nos fantômes pour écouter sa voix inimitable, celle d’un ami qui nous dit, « c’est moi », « confiance », « n’ayez pas peur ». Comme aux disciples qui sont restés dans le spectaculaires après le succès de la multiplication de pain, Jésus nous dit de quitter les lieux de nos vanités pour le silence du cœur à cœur avec Dieu. C’est dans ce silence paisible, et non dans l’ouragan, que nos cœurs se disposent à écouter l’Esprit de Dieu qui nous souffle toujours la direction à prendre afin qu’autour de nous, « amour et vérité se rencontrent » et que « justice et paix s’embrassent » (Ps 84/85, 11).

Pour que cela soit une réalité, demandons au Seigneur la grâce d’une conversion définitive et d’un engagement résolu à le suivre afin que les gestes de paix que nous accomplissons dans nos eucharisties nous engagent et deviennent réalité dans nos vies.  Amen.                                     

Prière universelle

Au milieu de la tempête,
secoués par les vents contraires, battus par les vagues,
les apôtres ont été réconfortés par la voix du Christ
qui leur disait : « Confiance, n’ayez pas peur ».
Présentons-lui nos prières de ce jour dans la foi et l’espérance.

Prions pour notre Église et spécialement pour les jeunes de retour des JMJ.
A l’appel du Pape François,
qu’ils laissent « résonner dans leurs cœurs l'invitation pressante du Seigneur à se lever »,
à se relever après les chutes,
et à porter aux autres la bonne nouvelle de
« l’expérience de la présence du Christ ressuscité dans nos vies ».

I 26 d – « Seigneur, fais grandir notre foi ! ».

Prions pour les responsables politiques et économiques
afin qu’ils développent un monde meilleur
en cherchant les chemins, les moyens qui construisent la justice et la paix.

Prions pour notre monde où la maladie,
les épreuves de la vie, les angoisses face à l’avenir
ou encore les catastrophes naturelles
laissent beaucoup de personnes seules et désemparées.
Que la main du Christ tendue à chacun et chacune,
les guide et les rassure tout au long de leurs épreuves.

Prions pour les sauveteurs, les maîtres-nageurs, les marins,
qui en ce temps estival, veillent sur la sécurité des baigneurs,
portent secours à ceux qui sont en détresse et,
contre vents et marées, luttent et se battent pour sauver les naufragés.

Prions pour nous tous rassemblés aujourd’hui :
que nous mettions notre confiance dans cette présence du Christ
qui sera avec nous jusqu’à la fin du monde.

Seigneur Jésus, exauce nos prières
et que ta main continue à nous saisir,
surtout lorsque le doute, et la peur nous font couler,
pour que nous avancions dans la foi.
Toi qui règnes pour les siècles des siècles. Amen.

Abbaye
Notre Dame de
Jouarre